Poulinage : les bonnes pratiques

Pour les éleveurs novices comme pour les expérimentés, le poulinage demeure un moment spécial, qui allie souvent stress et excitation. Voici quelques clefs pour appréhender au mieux l’arrivée d’un nouveau-né.

I. En amont du poulinage

Le temps de gestation chez la jument se situe entre 338 et 343 jours, ou encore autour de 11 mois et 11 jours. On considère qu’un poulain naît prématurément si le poulinage se déroule en amont de 320 jours de gestation. Un suivi vétérinaire poussé sera alors nécessaire. A contrario, une gestation de plus de 340 jours sera considérée comme longue : vous devez alors vérifier avec votre vétérinaire l’absence de complications. 

En amont de la mise bas, c’est-à-dire quelques jours avant, des changement physiologiques s’opèrent : les poumons du poulain se préparent à respirer de l’air, ses intestins se préparent à recevoir de la nourriture, et surtout, il sécrète des hormones permettant à la jument de se préparer à la mise bas. Certaines juments démontrent des signes indiquant l’approche du poulinage (mais ce n’est pas le cas pour toutes et les délais ne sont pas systématiquement les mêmes en fonction des juments !) : la distension des trayons aura lieu 4 à 6 jours avant la mise bas, et on pourra voir apparaître les bouchons de cire (il s’agit de colostrum séché) 1 à 4 jours avant la naissance. 

^{Bouchons de cire (source : IFCE).}

Le poulinage approche lors de la sécrétion de relaxine chez la jument. Cette relaxine est produite par le placenta, et elle entraîne un relâchement des tissus situés au niveau de la croupe de la mère. 

Les experts de l’IFCE (Institut Français du Cheval et de l’Équitation) recommandent, lorsque la jument se prépare au poulinage, de la rentrer le soir dans un box de poulinage vaste, propre et bien paillé, de lui laisser un licol sur la tête, et de lui poser une bande de queue (veiller à ce qu’elle ne soit pas trop serrée pour ne pas faire de garrot). Si la vulve de la jument est cousue, faites-la découdre par votre vétérinaire. 

II. La préparation

La préparation est la première étape du poulinage pour la jument. Elle montre des symptômes d’anxiété, de l’agitation (causée par les contractions utérines) et a tendance à se coucher et à se relever à répétition. Elle regarde ses flancs, peut les mordre, tourner en rond et uriner fréquemment. 

Vous pouvez veiller à ce que les cuisses, les mamelles et la vulve de la jument soient propres (les laver avec un savon doux si nécessaire) et rester à distance tout en la surveillant (à venir : les moyens de surveillance lors du poulinage) qui aura besoin de calme pour donner naissance. 

Cette étape de préparation dure en général une à deux heures de temps. C’est à ce moment que le poulain va se placer en position de “plongeon”, c’est-à-dire les antérieurs devant, suivis par la tête. 

^{Les positions du poulain en fin de gestation
(Source : Jeffcot et Rossdale, Supplément n°27 du Journal of reproduction and Fertility).} 

III. La présentation du poulain

Gardez votre trousse de poulinage à portée de main (article à venir sur le contenu de la trousse de poulinage !) : un lubrifiant stérile, des ciseaux, une pince à clamper, et une solution de teinture d’iode à 2% ou de chlorhexidine à 0,5% qui vous servira pour la désinfection du cordon ombilical. 

Restez à distance et n’intervenez que si c’est nécessaire !

Le processus d’expulsion du poulain débute lorsque l’ocytocine est sécrétée : c’est à ce moment que la poche des eaux va se rompre. Une fois que la jument a perdu les eaux, vous verrez apparaître une membrane blanche appelée amnios. La tête du poulain apparaît ensuite.  

La position souhaitable lors de l’expulsion du poulain est dorso-sacrée, en posture étendue.

• Si la présentation du poulain s’avère mauvaise, appelez le vétérinaire immédiatement ! En l’attendant, faites marcher la jument : la marche calmera les contractions et il est possible que le positionnement du poulain se modifie naturellement.
• Si, lorsque le poulain se présente, il ne rompt pas la membre blanche, rompez-la vous-mêmes pour pouvoir dégager ses voies respiratoires.
• Si vous voyez une membrane rouge apparaître au niveau de la vulve, il s’agit d’un “red bag” : le placenta ne s’est pas rompu, et sans intervention, c’est un risque majeur pour le poulain qui va étouffer. Faites une incision verticale de la membrane à l’aide de ciseaux à bouts ronds. L’allantoïde se vide, et derrière se trouve le placenta qu’il faudra également percer pour permettre au poulain de ne pas s’asphyxier.

Le poulinage dure en général autour de 20 minutes. Contactez également votre vétérinaire si l’expulsion est plus longue. 

Une fois le poulain expulsé, le cordon ombilical relie encore la mère et le nouveau-né. Il est important que celui-ci ne se brise pas trop rapidement, car un transfert sanguin se produit juste après le mise-bas. Les soins et la désinfection du cordon ombilical sont primordiaux pour éviter germes et infections. Consultez notre article sur les soins au poulain nouveau-né pour en savoir plus sur les soins à apporter au cordon. 

Une fois que le nouveau-né a été expulsé et que le cordon ombilical est rompu, il peut être amené doucement à la tête de sa mère. A ce stade, il est conseillé de se retirer et de laisser la jument et le poulain faire connaissance sans intervention extérieure.

IV. Expulsion du placenta

La dernière étape du poulinage est l’expulsion du placenta. Cette étape est assez longue et peut être douloureuse pour la jument qui peut manifester des signes de type coliques. Ne tirez jamais sur le placenta : les risques d’hémorragie ou de déchirure du placenta sont trop élevés. Si un morceau de placenta restait coincé dans l’utérus de la mère, il induirait une fourbure de parturition. Vous pouvez éventuellement faire un noeud dans la délivre pour éviter que la jument ou le poulain ne marche dessus, et pour que le poids du noeud facilite l'expulsion naturellement.Si, au bout de 2h, le placenta n’est toujours pas expulsé, contactez votre vétérinaire. 

L’examen du placenta, ou “délivre”, une fois expulsé, est important, pour détecter un problème qui nécessiterait d’intervenir auprès de la jument ou du poulain. Pour l’examiner, il faut retourner la délivre « comme une chaussette" : la face veloutée rouge est celle qui était en contact avec l’utérus de la jument et permettait les échanges avec le poulain.

Il faut essayer de s’assurer qu’elle est entière, avec un aspect uniforme, de couleur rouge plus ou moins foncé. Il faut le faire rapidement car elle va se dégrader et changer de couleur assez vite. 

Si un morceau de placenta est manquant : appelez votre vétérinaire, la jument doit être traitée. 

De même, s’il y a des zones décolorées, épaissies, ou que l’aspect manque d’homogénéité, le poulain doit être surveillé de très près par votre vétérinaire. N'hésitez pas à prendre la délivre en photo pour la montrer à votre vétérinaire, et à la mettre au frais (mais ne le congelez pas !)  pour qu’il puisse éventuellement l’examiner.

 
^{Examen du placenta (Source : IFCE).}

 
V. Surveillance de la mère et du poulain. 

Une fois le poulinage terminé, prodiguez à la jument et au poulain les soins nécessaires. Pour la jument, assurez-vous qu’elle ait un accès à une eau propre et en quantité suffisante, du foin à volonté et une litière propre et confortable. Surveillez sa température rectale, qui doit se situer entre 37,5 et 38,5°C.

Dans ses premières heures de vie, le poulain vous demandera une attention particulière et des soins adaptés : consultez notre article sur les soins à apporter au nouveau-né pour en savoir plus sur cette nouvelle étape.